14 septembre 2012

Etude de l'INSERM: Le stress professionnel malmène le coeur


Retrouvez l'article de Anne Jeanblanc sur le site Le Point.fr - Publié le 14/09/2012

Les personnes qui subissent de fortes pressions dans leur travail ont un risque d'infarctus du myocarde augmenté de 23 %.

En France, chaque année, entre 3 400 et 4 000 infarctus seraient imputables au stress au travail.
En France, chaque année, entre 3 400 et 4 000 infarctus seraient imputables au stress au travail. © Superstock/Supersto

Le travail, ce n'est pas forcément la santé ! Une très vaste étude européenne, publiée vendredi dans la revue The Lancet, le confirme. Elle a été menée par l'IPD-WORK Consortium (Individual-Participant-Data Meta-analysis in Working Populations), qui regroupe treize cohortes en population en Europe, soit au total près de 200 000 personnes. Sa partie française est assurée par des chercheurs de l'unité Inserm 1018 "Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations" et de l'université Versailles-Saint-Quentin. Et elle conclut donc, sans doute possible, l'existence d'un lien entre la survenue d'infarctus du myocarde (les auteurs parlent d'accidents cardio-vasculaires ischémiques) et le stress au travail.
Au cours des dernières années, des chercheurs ont tenté d'établir le rôle respectif d'une série de facteurs psychologiques - comme la personnalité, la cognition ou le stress - dans le développement de maladies cardio-vasculaires. Mais c'est le stress au travail, résultat de la combinaison d'une forte charge de labeur avec peu de marge de manoeuvre, qui a fait l'objet de la plus grande attention. Des études précédentes avaient déjà montré que ce dernier doublait le risque de survenue d'événements coronariens. Mais d'autres travaux aboutissaient à des conclusions bien moins alarmantes. Cette fois, le consortium européen IPD-WORK - lancé en 2008 - apporte une réponse précise.

Près de 4 000 infarctus

Parmi les populations étudiées figure la cohorte française GAZEL, constituée de près de 20 000 agents d'EDF-GDF suivis depuis 1989. Les autres cohortes ont été lancées de 1985 à 2006, enBelgique, au Danemark, en Finlande, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en Suisse. La moyenne d'âge des participants est de 42,3 ans, avec autant de femmes que d'hommes. Le stress a été évalué par des questionnaires portant sur les aspects psychosociaux liés au travail. Il s'agit, par exemple, d'analyser la demande, l'excès de travail des individus, les demandes conflictuelles auxquelles ils sont confrontés, le temps restreint pour accomplir les tâches qui leur sont confiées. La proportion d'individus exposés au stress au travail variait entre 12,5 et 22,3 %, selon les précédentes études. Sur cette grande population, elle est évaluée à 15,3 %. Et, sur les 197 473 personnes suivies, 2 358 ont été victimes d'un événement coronarien.
En harmonisant les données, on voit que "les individus exposés au stress au travail ont un risque plus élevé de 23 % de faire un infarctus que ceux qui n'y sont pas exposés", explique Marcel Goldberg, le principal auteur français. Quand on prend en compte des modes de vie, l'âge, le sexe, le statut socio-économique et la répartition géographique des participants, les résultats sont pratiquement inchangés. Si l'on étudie la population globale (stressée et non stressée), les chercheurs considèrent que le stress au travail est associé à une augmentation relativement modeste du risque de faire un infarctus, mais qui n'est pas négligeable : "Dans notre étude, 3,4 % des infarctus recensés parmi les 200 000 individus sont attribuables au stress au travail. Sur les 100 000 à 120 000 infarctus survenant en France chaque année, cela correspondrait tout de même à environ 3 400 à 4 000 accidents imputables à ce facteur de risque", souligne Marcel Goldberg.
Les chercheurs européens suggèrent de renforcer la prévention du stress au travail pour réduire ce risque existant. Et, selon d'autres études récentes réalisées par ce même consortium, de telles mesures préventives pourraient avoir également un impact positif sur d'autres facteurs de risque, tels que le tabac et l'alcool, dont la consommation est partiellement liée au stress.

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